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Erhard Göttlicher
VENEZIANA

Venise en novembre
et autres projets...

10 août au 7 septembre 2013
Erhard Göttlicher: un réaliste d'humanité...
D’origine autrichienne, professeur aux Beaux-Arts de Hambourg, Erhard Göttlicher pratique ce que l’on pourrait appeler un réalisme d’humanité. Qu’il peigne au mois de novembre une Venise grise et détrempée, sans Campanile ni gondoles, sans pigeons, sans âme qui vive, ou qu’il reprenne l’un de ses thèmes favoris, le nu, Erhard Göttlicher, peintre, dessinateur et illustrateur surdoué, poursuit une oeuvre qui, bien que dans la plus ancienne tradition de l’Histoire de l’art, n’est ni obsolète ni traditionnaliste mais, paradoxalement, l’expression même de notre époque.

Ses nus sont éminemment contemporains. Si son dessin, de par son réalisme puissant et précis qui n’est pas sans rappeler les peintres du Jugement Dernier et de  l’Apocalypse, est souvent splendide, Göttlicher n’embellit pas. Il montre le corps humain dans son impitoyable réalité. Les images peuvent choquer nos yeux habitués aux canons aseptisés promus par la publicité. Göttlicher: « Ce qui me dérange dans notre époque, je m’efforce de le communiquer de manière tout aussi dérangeante, dans l’espoir que, peut-être, les choses changent..

L'exposition présente d'une part la série dont le nom complet est "Malinconia Veneziana", "Mélancolie vénitienne", des tableaux de Venise au mois de novembre, traités à la mine de plomb et à l'acryl avec une fluidité et une légèreté qui leur donne presque un caractère d'aquarelles.
Pourquoi avoir choisi seulement l'adjectif "veneziana" pour titre de l'exposition? Traduire le titre eût été sacrilège, et combien d'amateurs, dans le public composé surtout de Français, d'Allemands, de Belges, de Hollandais, d'Anglais etc auquel s'adresse la communication de la galerie, combien eussent été à même de comprendre le terme italien "malinconia"? Veneziana, associé à l'image, évoque tout simplement Venise et chacun peut y mettre ce qu'il veut.

La Venise de Göttlicher, c'est la Venise hivernale dépouillée de son aura ensoleillée, la Venise du mythe qui, depuis si longtemps, prend l'eau, la Venise de quand toutes celles et ceux qui recherchent avant tout leur propre reflet dans le miroir pourtant terni de ses ors et de ses paillettes sont retournés à un quotidien moins brillant, certes, mais certainement plus sûr.
Venise, dont la population ne cesse de diminuer — 112 000 habitants en 1976, 58 500 en 2012 — est confrontée à une situation aussi bien climatique qu'économique dramatique. L'amplification du phénomène de l'"acqua alta", qui submerge la ville périodiquement, la montée générale du niveau des mers, l'affaissement du sol, des perturbations dans l'hydrographie, la disparition de la biodiversité marine: autant de facteurs qui ont des conséquences importantes dans la vie quotidienne des habitants, qui doivent abandonner les niveaux inférieurs des maisons et emprunter des systèmes de passerelles pour se déplacer. Mais les conséquences les plus importantes sont la détérioration inexorable des monuments historiques et de l'habitat due à la montée des eaux et l'apport qui s'en suit de produits nocifs à la pierre et à la brique.
C'est cette Venise-là, la Venise vraiment contemporaine, détrempée, plombée et moisissante, que montre Göttlicher à l'aide d'une peinture acrylique délayée, aussi "acqueuse" que de l'aquarelle, inondant avec maestria des esquisses préparatoires à la mine de plomb.

Et puis il y a les autres facettes de l'oeuvre du peintre, les nus, d'abord, autrement dit la représentation de la figure humaine, thématique privilégiée qui jalonne tout son parcours. Il ne s'agit pas pour lui de la recherche d'un idéal de beauté, mais de la saisie, à travers les spécificités individuelles de chaque modèle rendues sans concession, de la réalité générale de l'être humain. Son oeil aiguisé capte avec avidité le moindre détail, autant de particularités qui, de par son trait virtuose, précis et puissant, prennent un caractère d'universalité et traduisent aussi bien la joie ou le plaisir que le désespoir ou l'agression. 
Le monde des nus de Göttlicher est notre monde, qui a toujours connu, entre  autres, l'agression et le meurtre, que l'artiste s'efforce de dénoncer par des images ou des dessins très durs. Ainsi a-t-il illustré "Nana", de Zola, "Les liaisons dangereuses", de Choderlos de Laclos, ou "La liste de Schindler", de Thomas Keneally, qui a inspiré le film de Spielberg (série présentée dans l'exposition).

Comme le dit très justement Friedhelm Häring dans le livre "Nus" consacré à l'artiste: "Göttlicher zeigt uns das Kleingedruckte im Vertrag, das wir auf Lebzeiten abschliessen. Dies wird gern übersehen. Dann schmerzt es." Autrement dit: "Göttlicher nous montre ce qui est imprimé en petits caractères dans le contrat que nous signons avec la vie, pour la vie. Et que nous omettons volontiers de lire. Omission qui peut faire très mal."